Le Succès de la Petite Chaise Noire




Le succès de la petite chaise noire.
Article publié le 29 Avril 2005, Par Michèle Champenois, Le Monde.


MALLET-STEVENS a souvent dessiné des meubles pour les espaces qu'il créait. Ce fut le cas notamment pour l'aménagement de la villa Cavrois à Croix (Nord), équipement, boiseries et mobilier. Il est d'autant plus navrant que cet édifice ait été, à partir de 1986, sauvagement dépecé et que les pièces aient été dispersées sur le marché des antiquités modernes. Le sort a été au contraire favorable à une modeste chaise, sortie de l'anonymat par un tour de magie auquel contribuent trois femmes : Nicole Bamberger, journaliste au Jardin des modes, résidente de la rue Mallet-Stevens (Paris-16e) et active défenseure de l'intégrité du site au début des années 1980 ; Catherine Gilbert, petite-fille de Robert Mallet-Stevens, qui utilisait dans sa cuisine une petite chaise en métal, austère et distinguée ; Andrée Putman, alors éditrice de meubles des années 1930, qui reprend ce modèle et fait un objet à la mode, de grand hôtels aux salons de couturiers. La " chaise de Mallet-Stevens " est un paradoxe : selon les organisateurs de l'exposition, qui relatent avec précision sa généalogie, aucun document autre que le brevet déposé par la société Tubor ne peut être retrouvé pour en attribuer la paternité exclusive à l'architecte. Plusieurs milliers d'exemplaires en ont été produits pour l'Exposition coloniale de 1931. Mallet-Stevens en a adapté le modèle à de nombreuses reprises, de 1935 à 1939, pour le restaurant du Salon des arts ménagers, dont il assurait la décoration. Enfin, un dessin de sa main en propose une variante, avec une assise en cuir et tube Inox, ce qui laisse penser qu'il avait autorité sur les versions antérieures.